Olivier Nakache et Eric Toledano, un cinéma humaniste

De films en films, Olivier Nakache et Éric Toledano se sont imposés comme des figures majeures du cinéma français grâce à leurs comédies sociétales à l’humour salvateur. Ils réconcilient films d’auteurs et films populaires grâce à leurs comédies qui mettent en scène des personnages a priori opposés, des tandems qui vont s’entre-aider, s’amuser et s’apprécier malgré leurs différences. Faire rire avec des sujets difficiles est la marque de fabrique de leur cinéma qui revendique les comédies italiennes des années 1960 et 1970.

Réalisateurs français, Olivier Nakache est né à Suresnes en 1973 et Eric Toledano à Paris en 1971.

Ils débutent avec Les Petits souliers (1999), sélectionné au Festival de Clermont-Ferrand. En 2004, Gérard Depardieu rejoint Jean-Paul Rouve pour leur premier long Je préfère qu’on reste amis. Ils adaptent ensuite leur court-métrage Ces jours heureux (2002) qui devient le succès Nos jours heureux, et en 2009 sort la comédie sociale Tellement proches. En 2011, le phénomène mondial Intouchables, qui réunit François Cluzet et Omar Sy fait 19 millions d’entrées en France et 31 millions d’entrées à l’étranger. Le film est nommé aux Golden Globes, aux BAFTA et remporte le Goya du meilleur film européen, Omar Sy est consacré Meilleur Acteur aux César. Ils le retrouve en 2014 pour Samba, comédie dramatique avec Charlotte Gainsbourg. En 2017, Le Sens de la fête, comédie portée par Jean-Pierre Bacri, obtient 10 nominations aux César. En 2019, Hors normes, présenté à Cannes en Sélection Officielle, met en scène Vincent Cassel et Reda Kateb.

Source : cinetek

crédit photo : mairie de Rueil-Malmaison/Christophe Soresto

Récompenses

Source : wikipedia

Leur interview dans Rueil Infos, magazine municipal de Rueil-Malmaison :

Interview d’Olivier Nakache et Eric Toledano, réalisateurs et invités d’honneur de l’édition 2022 du Festival du Film Contemporain de Rueil.

Qu’est-ce que cela représente pour vous d’être ainsi mis à l’honneur ?

« Bien sûr, nous sommes très fiers. Rueil est d’abord une ville qui est exactement à équidistance entre la ville où a grandi Eric, Versailles, et la ville où j’ai grandi, Puteaux. Elle est donc symbolique pour nous. Être ainsi mis à l’honneur nous touche beaucoup car nous avons encore l’impression d’être des débutants et le sentiment d’avoir tant de choses à apprendre de film en film. Nous ne regardons pas beaucoup dans le rétroviseur mais c’est vrai que là, presque jour pour jour, nous allons célébrer les dix ans du film Intouchables. Forcément, ça nous fait quelque chose. Par ailleurs, nous allons remettre le prix du court-métrage et c’est pour nous très important, c’est la première pierre dans la construction d’une carrière. Nous adorons nous tourner vers la relève, la jeunesse, vers nos futurs collègues. Nous sommes nés du court-métrage. Dès notre rencontre, nous avions une folle envie de cinéma, nous ne savions pas du tout par quel bout le prendre. Il y avait des écoles de cinéma, mais pour nous le plus important restait le court-métrage, cette carte de visite, ce premier pas. Il pourrait se résumer à : « du concret vient le concret ». Réalisateur est un métier si particulier, on l’apprend en le pratiquant. Si on a quelque chose à dire qui nous brûle le ventre, si on a envie de le raconter, de le transmettre, de le partager avec le plus grand nombre, il faut démarrer par cet exercice si particulier. Pour nous, ce fut notre acte de naissance, alors forcément nous sommes très heureux et fiers de remettre ce prix ».

L’humour, la comédie, le décalage, sont-ils pour vous aujourd’hui les meilleurs vecteurs pour sensibiliser le public à des problématiques sociétales d’actualité ?

« C’est en tout cas notre bouclier à nous, notre ADN, depuis nos premiers courts métrages. Nous avons envie de parler de sujets qui nous touchent, de notre société, du monde qui nous entoure. Nous rêvons de prendre en flagrant délit notre époque, et pour ça, notre vecteur à nous, c’est l’humour. C’est notre pas de côté pour essayer d’amener un petit peu de légèreté sur des sujets de fond. Nous avons l’impression que c’est un bon moyen pour sensibiliser les gens à certaines problématiques. Beaucoup de nos films de référence sont des comédies. Il y a une phrase de Wolinski que nous aimons beaucoup, nous la répétons souvent, « le plus court chemin entre deux êtres humains, c’est le rire ». Pour nous, la comédie, le rire, c’est une forme d’élégance pour parler de certaines choses. Cela peut aussi s’apparenter à de la tristesse déguisée, comme quand dans Le Sens de la fête, où le marié joué par Benjamin Lavernhe cite Beaumarchais dans « Le Barbier de Séville » : « Je me presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer ». Quand nous abordons un sujet comme le handicap, physique ou social,  dans Intouchables, c’est un sujet évidemment dramatique. Il y a beaucoup de souffrance, mais quand nous tombons sur cette histoire, l’humour, l’humanité et la comédie qui se dégagent entre ces deux personnes-là créent une poésie et racontent au plus près leur relation si singulière. Il n’y a aucune pitié, pas de compassion, et ça, ça nous a forcément séduits. Idem quand nous traitons un sujet comme l’autisme dans Hors Normes ».

Dans cette période troublée que nous vivons, comment convaincriez-vous le public d’aller en salles ?

« C’est vrai que les temps sont difficiles pour les salles de cinéma, pour les distributeurs, pour les producteurs. Il faut encourager les gens à retourner en salle parce que c’est magique. Cette magie-là, on ne l’a nulle part ailleurs. Pour nous, aller au cinéma, c’est quasiment religieux, c’est sacré. L’offre est là, en France nous avons la chance d’avoir une des productions les plus diversifiées au monde. Cette chance est unique, il faut bien s’en rendre compte. Films d’auteurs, comédies populaires, films d’action, de genre, de science-fiction, le cinéma français est d’une incroyable diversité ! En ce moment, nous essayons de mobiliser un peu tous les acteurs de la production en France pour rester debout, continuer à marcher, à faire que cette production soit si énergique, si vive, si diversifiée. C’est ça qui fait la force du cinéma français. Continuez à aller partager vos émotions avec des inconnus, rien ne remplace l’idée de rire ou d’être ému au milieu d’inconnus, c’est une chimie irremplaçable ».